Tanpopo : une fleur de pissenlit au pays des artichauts

François Evangelisti et Naoko Kuryama

Nous connaissions, en France, les couples franco-japonais de chefs étoilés mariés, parfois de longue date, à des Japonaises (depuis Raymond Oliver dans les années 60, – c’est peu dire ! – jusqu’à disons, Éric Briffard ?… ) mais c’est bien la première fois que nous rencontrâmes un couple nippo-français, une chef (« cheffe »?) du Pays du soleil levant mariée à un Français d’origine italienne et qui opère, qui plus est, sur nos terres bretonnes… Une simple frégate de la gastronomie qui est devenue, au fil de ses cinq années d’existence, à quelques encablures du vaisseau amiral cancalais « Roellinger », un lieu de retrouvailles pour les amoureux des sensations gastronomiques fortes. 



Voilà une bien étrange adresse (photo ci-dessus) peu connue des profanes. Même si les labels Gault-et-Millau fleurissent tout jaune en vitrine comme les fleurs de pissenlit (traduction de «  Tanpopo »), sans parler de celui du Fooding, cela restera pour le moment une adresse bien confidentielle et tout à fait exceptionnelle à Saint-Malo et en Nord Bretagne : 6 tables et 14 couverts (un point c’est tout). Autant dire qu’il faut réserver, car beaucoup de gens du coin surtout, quelques touristes gastronomes l’été, tentent aujourd’hui l’aventure de Tanpopo


La liqueur de prune japonaise et eau gazeuse ou le saké au citron vert sont servis en apéritifs pour les plus téméraires. Suivront 6 plats et 1 dessert parfaitement réalisés par Naoko. 

Dans l’ordre : 


1/ Terrine de lapin et cocos de Paimpol au su-miso : un entrée bien française avec une touche nippone bien maîtrisée (miso vinaigré, fleur de coriandre, algue). 


2/ Soupe de petits pois et moules : classicisme, avec de l’invention. Les moules mixées servent de liant à la soupe (peut-être avec du poisson ?). Un beau potage vert dans un bol rouge, avec une bonne idée de mêler le sucré des petits pois et le côté iodé des moules. 



3/ Sashimi de maquereau au ponzu : le maquereau mariné fait peut-être trop français, mais la gelée au yuzu (on ne sent pas le yuzu ?) et surtout la gelée de concombre et tomate verte à la sauce soja sont une trouvaille. Feuille de basilic thaï. 



4/ Croquette de porc, ris de veau et foie gras : on mange enfin (il est 22h00) ! Beaucoup de travail… Servi très chaud juste frit, une vraie conscience professionnelle, avec une sauce miso très goûteuse, sur un lit de chou «  pointu » (?). Les dés de poivron sautés sont facultatifs, tout comme la rondelle de courgette frite pourtant parfaite. Très très bon… 



5/ Raie mijotée : MAGNIFIQUE… Bonne température, radis rose mariné au vinaigre sucré au-dessus, algue kombu coupée en lanières qui offre une texture différente, croquante, de celle de la raie plutôt fibreuse, poivre sansho (un équivalent du poivre de Sichuan en plus doux), une aubergine marinée frite dans la peau comme support… Une vraie révélation. 



6/ Nouilles de patates douces et langue de bœuf : servies froid, cela conclut assez bien le repas, mais aurait mérité plus de caractère. Le concombre court vert est étonnant par son amertume. 


7/ Biscuit au thé vert matcha, mousse yuzu, gelée de framboise-melon. Sorbet banane-passion : très agréable, élégant, et bien maîtrisé. 

Cela relève bien entendu de l’aventure gastronomique… Le service dure le soir au moins 3 heures, un peu long sans doute. Il faut donc mériter Tanpopo… Les plats sont présentés à la minute par François qui fait les allers-retours entre la petit cuisine du rez-de-chaussée et l’étage de service, via un escalier plutôt raide… Les murs gris sont d’une zénitude sans pareil qui peut inviter parfois à la somnolence, au mieux au repos. Quant à l’intimité, elle est peut-être limitée par le silence des autres convives, qui se délectent religieusement, des explications du maître de salle avant de passer à la dégustation proprement dite. 

Mais cela fait du bien à Saint-Malo au milieu des moules-frites, des crêpes de pirates et autres saltimbanques de la Cité corsaire… 

Tanpopo fait aussi partie de mes films culte de nourritures terrestres réalisé par le cinéaste Juzo Itami (1985) – tué vraisemblablement d’après mes sources en 1997 par des yakuzas dont il dépeint les mœurs dans ce film – qui a été l’inspirateur (et pas l’aspirateur pour ceux qui ont vu le film !) de ce restaurant. 

 


Tanpopo
5, rue de la Poissonnerie
35400 Saint-Malo
Tél. : (33)2.99.40.87.53

Menu le soir (hors boissons) à 41 €

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