Il fut un temps où nos parents nous racontaient tout jeunes des histoires pour endormir nos frayeurs d’enfants, relancer nos ardeurs , bref, nous faire réfléchir en imaginant des mondes autres, personnels ou opposés, remplis de projections plus ou moins maîtrisées où nous pensions découvrir par ces expériences rêvées et projetées des adultes la vraie vie, celle de demain, d’un avenir non pas enchanteur sans doute, mais d’un réel avenir rempli de souhaits et de rêves, d’improbabilités tout à fait réalisables, pour nous. Cela était un temps béni, car nous pouvions alors tout imaginer et donc nous avions tout à faire : lire beaucoup, rêver encore plus, maîtriser les outils de nos rêves en faisant quelques études…
L’écran banalisé, l’image, les images imposées d’aujourd’hui dans un cadre si restreint ont tout balayé en nous ancrant dans le soit-disant monde réel pour mieux nous désapproprier peut-être quelque part nos existences et nos envies, celles de nos enfants et celles de nous-mêmes, pour mieux, dans le meilleur des cas, nous faire penser à autre chose mais ne jamais rêver à autre chose qu’à ce que ces mêmes images nous proposent : un ennui mortel où seule l’action prime et compte, où seuls les acteurs jouent un rôle à notre place, où nous ne sommes plus que les ectoplasmes de cette société. Au fil des ans, comme journaliste et conférencier, je remarque une passivité des lecteurs et de l’auditoire bien normale, compte tenu de la faiblesse des médias, de la culture en général, de la fragilité même des supports de communication et de notre entêtement tout à fait normal à coller à notre société. L’action a primé sur la contemplation et plus encore sur les projections du rêve, du fait de rêver autrement.
Du plus jeune âge au plus prononcé, je remarque tout benoîtement que le public a besoin pour réfléchir de chiffres canoniques ou d’émotions gratuites et benêtes pour commencer à réfléchir. Ils suivent les grands thèmes rabâchés par les médias politisés et ineptes de l’actualité pour mieux produire sur la toile leur inculture et leur ennui qui consiste à répéter ce qu’ils ont déjà vu ou entendu à l’infini. Cela n’est pas un rêve , mais un vrai cauchemar. Cela n’est pas la liberté. Ce n’est pas du rêve. Ce n’est pas moi et ce n’est pas vous. Je pense que cette situation, pas très originale au vu de l’histoire, est une d’une totale ineptie en ce début de siècle et qu’il ne faudrait que pas grand chose pour remédier à son éradication. Il suffit de se retourner vers le passé pour croire en l’avenir, il suffit d’un peu de culture pour commencer à être un peu différent d’hier, de se sentir ancré, non pas dans le temps qui passe, mais dans notre propre histoire, celle de maintenant, celle d’aujourd’hui où le monde continue avec nous et jamais sans nous, car nous sommes après tout uniques, le saviez-vous ?
J’ai eu la grande joie aujourd’hui, à quelques temps de Noël, de passer un peu de temps avec une vingtaine de malades d’Alzheimer (d’où le titre de ce petit post) dans un vrai projet thérapeutique de retrouvailles culturelles, pour expliquer, conter, rebondir sur l’histoire des Halles de Paris (je développerai sans doute ce sujet ici si vous êtes sages !). En une demi-heure, un temps si court, voilà que, avec un vrai historien, ceux qui perdent ou auraient perdu la mémoire, se retrouvent dans un autre monde de connivence, retrouvent à 80 ans passés des émotions, totalement enfouies dans le gouffre de leur maladie incurable encore à ce jour. Voilà que l’histoire refait renaître le présent, et que, pour certains, les larmes fusent aux yeux de bonheur, de souvenirs enfouis, de bribes de vie parisienne. Cela me fait chaud au cœur. Parler de gastronomie, de cuisine, de bouffe et d’histoire est un pari insensé, mais un but véritable. La preuve. Cette expérience en cours, sur les sensations partagées ou pas de la gastronomie et de son histoire – qui touche tout le monde – est une vraie aventure. Je l’ai commencée en 2018, au moment où j’arrêtais mes piges gastronomiques qui n’étaient que du marketing de bon aloi pour quelques marketeurs des temps modernes qui ne savaient pas manger. Au fait, saviez-vous que la gastronomie était un prétexte pour parler de la vraie vie, celle que nous avions quand nous rêvions encore, celle que nous pourrions encore avoir aujourd’hui ?
Magnifique projet, félicitations pour sa concrétisation dans la vie, la vie que notre coeur rêve a chaque instant a travers le rythme et la musique de notre âme.
Et bien quoi Isabelle… Sinon te dire et redire merci ! Mais un grand merci !!!
Bises.
Olivier