Nous sommes vers 1644. Nicolas Poussin a cinquante ans et travaille depuis un an sur une commande sur Les Sept Sacrements à Rome. Son travail s’attache à retranscrire au plus près les habitudes de table de l’Antiquité à l’époque du Christ. Il est bien certainement un des premiers à essayer de comprendre les habitudes de table romaines, d’après les rares relevés archéologiques de l’époque dont les gravures d’un certain Antonio Bosio tirées de son ouvrage Roma sotteranea paru quelques années plus tôt en 1632. C’est – de mémoire – un des premiers exemples d’étude d’après d’anciennes peintures paléochrétiennes romaines de reconstitution historique d’un repas romain antique à l’ère moderne.
Bien avant les découvertes de Pompéi et d’Herculanum un siècle plus tard, Nicolas Poussin souffle ici un air de modernisme dans ses recherches picturales qui n’aura d’héritiers que beaucoup plus tard au XIXe siècle. Nous voyons ici le triclinium en « U » cher aux Romains attesté par l’archéologie des années après. Ainsi Poussin pouvait-il s’enorgueillir, tel un historien des temps futurs, de « ne rien négliger », tel qu’il aimait à le dire.
Cela pourrait paraître superfétatoire mais n’est pas anodin. Il y a 460 ans, Nicolas Poussin s’occupait donc de vérités historiques pour peindre et pour s’exprimer, en homme moderne n’oubliant pas l’histoire de la gastronomie et l’histoire tout court.
Ce petit dessin innocent est visible au tout nouveau musée du Grand Siècle de Sceaux inauguré le 20 septembre dernier.