« Déjà les bateaux recevaient de la cendre, à mesure qu’ils approchaient plus chaude et plus épaisse, déjà aussi de la pierre ponce et des cailloux noircis, brûlés, effrités par le feu, déjà il y avait un bas-fond et des rochers écroulés interdisaient le rivage. Il hésita un moment : reviendrait-il en arrière ? Puis, à son pilote qui le lui conseillait : ‘La fortune, dit-il, seconde le courage ; mets la barre sur l’habitation de Pomponianus’. Ce dernier était à Stables, de l’autre côté du golfe (car le rivage revient sur lui-même de façon à former une courbe insensible que remplit la mer). En cet endroit, alors que le péril n’était pas encore là, mais avait été vu et en se développant s’était approché, Pomponianus avait fait charger ses paquets sur des bateaux, décidé à fuir si le vent contraire tombait. Ce vent à ce moment était tout à fait favorable à mon oncle qui arrive, embrasse son ami tremblant, le console, l’encourage et voulant calmer ses craintes par le spectacle de sa tranquillité à lui, se fait descendre dans le bain ; en en sortant il se met à table et soupe avec gaîté, ou, ce qui n’est pas moins beau, en feignant la gaîté. »
Lettre de Pline le jeune à Tacite dans laquelle il raconte l’éruption du Vésuve et la mort de son oncle Pline l’Ancien, auteur des Histoires naturelles.
Ouverte au musée de l’Homme le 8 juillet dernier, l’exposition « Dernier repas à Pompéi » est une invitation à remonter le temps, à la recherche de l’univers culinaro-gastronomique souvent méconnu du Haut-Empire romain à l’époque de l’éruption du Vésuve en 79 après J.-C. L’exposition dévoile pour la première fois en France des objets inédits jamais sortis hors de la péninsule en provenance des riches collections du musée archéologique national de Naples.
Depuis le XVIIIe siècle, l’un des sites archéologiques les plus illustres d’Europe visité en son temps par Mozart, Goethe ou Stendhal n’a cessé de fasciner. La taille relativement modeste de la ville de Pompéi avec ses 15 000 habitants a cependant révélé des montagnes de restes archéologiques, célèbres fresques et mosaïques, riche mobilier, mais aussi objets de la vie courante et, phénomène plus rare en Occident, restes alimentaires parfaitement conservés, préservés par la couche de cendres volcaniques (voir par exemple ci-dessus l’impressionnant pain carbonisé présenté à l’exposition prédécoupé en 8 parts, cuit le jour de l’éruption !).
Cabarets et boulangeries
L’économie pompéienne au moment de l’éruption était florissante. À partir du premier siècle de notre ère, celle-ci s’urbanise et le modèle de référence de la villa rurale, pilier de l’économie sous la République, cesse d’être le modèle. C’est l’essor du petit et du grand commerce, ainsi que des échanges monétaires. Parmi les quelque 600 boutiques retrouvées à Pompéi, environ le quart est constitué de thermopolia (néologisme latin venu du grec « chaud » et « vendre »), une sorte de cabaret disposant d’un comptoir, parfois d’un chauffe-eau pour couper le vin et de tables de cuisson pour manger chaud. Plaute, dans ses comédies, se moque d’ailleurs de ces lieux de débauche, souvent réservés aux plus pauvres ne disposant pas de cuisine à domicile. Les thermopolia sont complétés par les tabernae, sorte de bar-boutique avant la lettre. Outre des boissons froides, les tenanciers pouvaient servir du pain, de l’huile d’olive, du savon et différents objets manufacturés et d’importation… De petite taille et souvent modestes, les Thermopolia et tabernae servaient aussi de lieux de jeux et de détente. Autre lieu emblématique de l’essor du petit commerce, la boulangerie qui se développe à Rome dès le IIe s. av. J.-C. regroupe souvent dans le même local plusieurs meules, un pétrin et un four à bois. À Pompéi, 34 boulangeries ont été retrouvées. Celle d’un certain Modestus a permis d’y retrouver 81 pains carbonisés (voir photo ci-dessus).
Fruits nouveaux
Nous nous devons de rendre à notre façon gloire aux légions impériales romaines d’avoir su nous apporter de nouvelles sensations gustatives. Ce sont elles qui nous ont permis de savourer encore aujourd’hui de nombreux produits inconnus alors. Après la conquête des Gaules par César, la vigne déjà introduite par les Grecs et de nombreuses autres espèces se sont acclimatées à nos régions tempérées. L’abricot venu d’Épire au nord de la Macédoine, le citron de Médie en Asie mineure, les délicates poires, les prunes d’Arménie et de Syrie, sans compter les figues venues d’Asie déjà bien acclimatées et depuis longtemps en Égypte., sans parler de la cerise, autre nouveauté. La pêche appelée « pomme de Perse » venue de Chine occidentale et du Tibet et est cultivée très tardivement dans l’Empire romain au début du Ier siècle de notre ère très certainement via les routes de la soie, le siècle même de l’anéantissement de Pompéi… Pline l’Ancien s’étonnait déjà du prix exorbitant de ce nouveau fruit et ajoutait (Pline, XV, 40) : « c’est étonnant, parce qu’aucun autre fruit ne passe plus vite. Une fois cueilli, il attend au plus deux jours, et on est obligé de le vendre ».
Je propose une visite très personnelle de l’exposition « Dernier repas de Pompéi » au musée de l’homme le 5 décembre 2019 à 11h00.
Merci de réserver avant le 23 octobre en envoyant un mail olivier.brandily(at)orange.fr !
Tout le programme des prochaines visites est ici ! Merci de partager…
« Dernier repas à Pompéi »
Une exposition du Musée de l’Homme
du 8 juillet 2020 au 4 janvier 2021
17, place du Trocadéro
75016 Paris
Ouvert tous les jours sauf le mardi de 11h00 à 19h00
Plein tarif : 12 € / tarif réduit : 9 €
Tél. : 01 44 05 72 72