Voilà une belle projection pour l’historien que je suis. D’autant plus que j’ai un peu participé à ma façon pendant quelques mois à l’aventure de ce concours.
Le secteur de l’agroalimentaire, qu’il soit d’Île-de-France ou ailleurs, ne concerne que de très loin la gastronomie et la cuisine, mais il édicte ses propres règles, que l’on le veuille ou non, que l’on le regrette ou pas. Nous le savons bien, ce sont les producteurs, les tendanceurs pour reprendre un terme de la mode, et les faiseurs d’idées d’aujourd’hui qui feront la gastronomie de demain. Et nous le comprenons bien aussi : la cuisine et le goût ne sont plus une affaire de transmission comme il y a encore peut-être dix ou quinze ans, mais surtout de réseaux, de partages, dans un tel fourmillement de données que nous avons souvent du mal à séparer le bon grain de l’ivraie. Nous sommes arrivés avec les nouvelles technologies nées de la révolution numérique à un carrefour du dire et du faire, dans un marché effectivement globalisé où le marketing joue pleinement sa place, à tort ou à raison. D’où l’idée du concours IdFood, le concours de l’innovation alimentaire en Île-de-France organisé pour sa 6e édition depuis 2008 par le Cervia , l’organisme chargé de l’agriculture et du secteur alimentaire dans la région. Intéressant à plus d’un titre, ce concours est un véritable petit instantané de ce que le secteur de l’alimentation nous réserve. L’innovation est une bonne chose, mais la lutte est sévère. Comme le rappelait en ce 13 juin Xavier Terlet, président du cabinet XTC World Innovation, et animateur des débats : « Au vu des chiffres d’il y a 5 ans, 50 % des produits aujourd’hui en vente dans nos rayons, spécialisés ou pas, de la petite à la grande distribution, aura disparu dans 5 ans. Autre chiffre, 50 % des nouveaux produits aujourd’hui dans les rayons aura disparu dans seulement un an ». Tout est dit.
Le produit avant les services
En ce 13 juin, jour de remise des prix aux 7 lauréats que nous dévoilerons plus tard, sur 118 projets et concepts présentés, nous avons compté : 72 produits, 14 services, livraisons ou guides, seulement 7 applis ou machines, 4 restaurateurs ou traiteurs, 2 produits autres, 1 maraîcher (qui n’est autre que notre amie Marie Brouard déjà citée ici). Beaucoup de transformation donc et étonnamment, contrairement à nos attentes, peu de services ou d’applis qui ont la côte comme l’on sait. La solidarité aussi, grande icône de la communication et des écocitoyens est aussi bizarrement absente dans les projets présentés. Cela repositionne la donne.
Quelle tendances des produits ?
Tranches de société. Qu’en est-il des produits surreprésentés au concours à la loupe ? Ce morcellement des marchés et des consommateurs est à l’échelle de la société et de ses questionnements. Mais plusieurs faits ressortent avec facilité. Le naturel, le vegan et autres produits sans gluten sont parmi les 118 candidats ex-æquo à 18 candidats avec les desserts sucrés, confiseries et autres biscuiteries, tout comme les boissons (nous avons déjà beaucoup insisté là-dessus ici) dont en premier lieu les jus de fruits, le thé et les tisanes en deuxième position, et la bière d’Île-de-France enfin. Intéressant donc… Plus même. Le cœur au ventre n’a jamais été aussi près des tendance depuis sa création. La viande fait faux bond tout comme les alicaments de l’hyperespace et les pâtes. La cacao se porte pas mal comme antidépresseur naturel…
Citons pour conclure le nom des cinq lauréats récompensés avant-hier : Fresh Me up, une plateforme de ventes privées de produits frais BtoB, GreendOz, une gamme de préparations culinaires à base de légumes et de légumineuses, Joe&Avrels, préparations apéritives d’inspiration africaine, Orkestra, une machine connectée permettant la réalisation de cocktails pour les professionnels, et Tomm’ Pousse, des fromages végétaux tout ce qu’il y a de plus bluffants et gastronomiques. Goûtez-les juste, ce sont les meilleurs du moment…
Bravo aux lauréats. Et vive la gastronomie de demain !
Article très intéressant sur les évolutions de nos habitudes.
Merci pour ce partage,