Monjul a les crocs quand il revient de voyage…

Monjul, une contraction énigmatique pour « Mon Julien » (Julien Agobert étant le chef), est une petite adresse branchée, assez bien coincée dans le Marais inodore et incolore, entre le quartier juif (la rue des Rosiers n’en ayant plus que le nom), le monde homo et les Chinois de Wenzhou de la rue au Maire. Vous êtes sûr de bien connaître le Marais au fait ?

 


En ouvrant la porte, je n’en menais pas large et m’attendais à un accueil hautain, une bouffe branchée insipide sans saveurs et une note sur l’ardoise frôlant l’insolence… Mais rien de tel n’arriva (et c’est pourquoi on vous en parle). Le lieu est branché, mais pas trop, et très honnête. Un peu surpris peut-être par l’hôtesse musclée et gouailleuse sur les bords. Je m’installe à ma chaise design sur le parquet élastique qui résonne en cadence au pas des serveurs. La commande est prise sur une carte chiffonnée qui n’augure rien de bon, mais soyons fous, tentons l’aventure !  

Aïoli

En entrée : un Aïoli : brochette de bulots, cœur de sucrine, trio de betteraves, poireaux, œuf de caille poché, pommes de terre grenaille, sorbet aïoli et aussi un Pince-moi je rêve ! : effiloché de crabe (tourteau ou crabe de Silésie ?), brunoise de concombre, tube réglisse-bouillabaisse, raviole de patate douce – topinambour… Arrêtez je cale déjà ! Je suis sûr qu’il y a du drôle là-dessous, non ? Julien doit aimer les farces qui se mangent. C’est pas mal, mais les bulots ne sont pas d’une première fraîcheur. Le crabe n’a pas non plus un grand intérêt et je ne vois pas la bouillabaisse à l’horizon, même à la réglisse ! Et puis, y’en a un peu marre des ardoises comme dessous de plat à l’entrée, surtout qu’on les attend plutôt après le café… 

Pince-moi je rêve !


Tajine de caille

Suivent, – avec, sur la carte, des titres beaucoup moins amusants -, une Tajine de caille, caviar d’aubergine au basilic, carotte cumin coriandre, cacahuètes caramélisées, boulette de poulet au citron confit, pois chiche et raisins, ainsi que des Saint-Jacques gratinées au beurre de câpre, couteaux farcis persil, ail et citron vert, gratin de pâtes aux agrumes, taboulet libanais au poulpe… tout à fait honnêtes, eux aussi, mais sans grande inspiration. 

Saint-Jacques gratinées


Quant aux desserts, ils sont pour moi franchement insipides, sans saveur et peu gourmands, version light (pour filles qui craquent pour le sucré ?) oblige. La Banane moelleuse et paradisiaque et la poire excitante me feraient presque aimer d’un seul coup le Purgatoire et le monastère. L’agar-agar et ces gélifiants pour quatrième âge sont carrément désespérant (il n’y a donc pas de photos !). Gageons enfin qu’il y a sans doute aussi un peu d’arôme là-dedans, mais qui pourrait le leur reprocher ?

Pour conclure cette joyeuse balade avec mon « Jules », avouons quand même que l’ensemble est plutôt sympa, rigolo, assez bien foutu, pas trop cher et à conseiller aux petits jeunes se préparant au(x) grand(s) voyage(s) culinario-intergalactiques… 

Pour rebondir, cela fait des semaines que je pense  à ce mot : « OMNI » (pour « Objet Mangeable Non Identifiable »). Cet acronyme pourrait résumer ce qui se passe en ce moment à Paris, mais aussi en province, dans bon nombre de petites cantines à la mode, disséminées aux quatre coins de nos villes peut-être en mal d’identité. 

Globalisation des papilles, mondialisation des neurones ou simple exercice de style ? Peut-être un peu de tout ça à la fois. Ce n’est pourtant pas l’accumulation ou la diversité qui fait la qualité de l’assiette… C’est d’autant plus dommage que l’on perçoit ici un certain talent et un réel effort de séduction. À suivre donc… 



Monjul
28, rue des Blancs-Manteaux
75004 Paris
Tél. : (33) 1.42.74.40.15

Entrée (13 €), plat (20 €) et dessert (11 €) ou formule gourmande à 50 €

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