Le chef, le geste et l’outil

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Photos : Laurent Dupont / montage : Olivier Brandily

Une idée toute simple au départ, comme le sont souvent les bonnes idées. Laurent Dupont, photographe pointilleux, ayant travaillé notamment avec le chocolatier Patrick Roger, se décide un beau jour de janvier 2013 à rencontrer 46 chefs pour leur demander quel est leur outil de prédilection en cuisine ou en pâtisserie. Une idée fort lumineuse et jamais éditée à ce jour. Les créations d’un chef, d’un artisan, d’un artiste, tiennent souvent à leurs propres outils, souvent intimes, chargés de souvenirs et entretenus avec soin. Et d’ailleurs ne dit-on pas d’un bon ouvrier qu’il a toujours de bons outils ?

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Photos : Laurent Dupont / montage : Olivier Brandily

Pinceau / couteau / vrille / râpe / pompe à sucre / sonde / pierre à aiguiser / casserole / pince / louche / cuillère / balance / feuille (une sorte de hachoir de bûcheron… à la hauteur des tatouages musclés de Pierre Jancou) / fouet / économe / cloche de service (et oui… c’est Bertrand Grébaut, sans doute un peu stressé par le service ou l’entrée de ses plats en salle ?) / passoire ou passette (Akrame) /  assiette /spatule / diapason (une sorte de fourchette à deux dents pour la rôtisserie et les volailles) pour… Guy Savoy / mortier / batte de Michel Troigrois pour aplatir son saumon / aiguille à brider d’Alain Passard / forêt /  cuillère à quenelle /emporte-pièce / capucin (un cône de fer à poignée utilisé en rôtisserie pour arroser les rôts)… sont un vrai inventaire à la Prévert pour tous ceux qui ne cuisinent pas.Ces objets, aussi banals que la cuillère de Philippe Conticini, la louche  de Philippe Roth ou l’assiette de Yann Couvreur, aussi étonnants que la vrille de Michel Portos, souvenir de sa grand-mère  algéroise, que l’antique et vénérable capucin de Philippe Labbé ou l’exotique râpe japonaise en peau de requin de William Ledeuil et la petite et simple pince de Kei Kobayashi sont en revanche une réelle inspiration pour les autres. Ils participent au processus créatif aussi sûrement que les poils de martre d’un pinceau de maître, le burin d’un sculpteur ou la plume, l’ordinateur ou la table  d’un écrivain… Bien vu en noir et blanc, bien pensé donc, avec un minimalisme de bon goût, sans portrait des chefs accolé qui aurait été du plus mauvais goût – en enlevant une part du mystère, mais des gros plans des mains des maîtres culinaires et pâtissiers pour comprendre le prolongement du geste de ces orfèvres aussi un peu alchimistes… Disons-le tout net, un livre secret, atypique et enthousiasmant, aux jeunes éditions Kéribus que nous avions déjà saluées ici. Un chouette cadeau de Noël pour les amateurs.


Laurent_Dupont3Laurent Dupont, Le prolongement du geste, éditions Kéribus, 2014, 144 p.

Prix : 29,90 €

En vente dans toutes les bonnes librairies depuis le 15 octobre.

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